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Mon corps, mes choix, ta gueule  !
Article publié le 21 septembre 2021

Régulièrement, dans beaucoup de collèges et lycées de France, de nombreuses élèves reçoivent des avertissements ou se voient refuser l’accès de leur établissement parce que leur tenue est jugée « provocante » ou « indécente ». Les coupables : jupes courtes, shorts, hauts qui laissent apparaître les épaules ou le nombril, soutiens-gorge qui dépassent, absence de soutien-gorge… Par la Fédération SUD éducation.

Le tract imprimable et mis en page ici :

Sommaire
➢ Injonctions vestimentaires
➢ Grossophobie
➢ Assignation de genre
➢ Mutilations des enfants intersexes
➢ Droit à l’IVG

Injonctions vestimentaires

Régulièrement, dans beaucoup de collèges et lycées de France, de nombreuses élèves reçoivent des avertissements ou se voient refuser l’accès de leur établissement parce que leur tenue est jugée « provocante » ou « indécente ». Les coupables : jupes courtes, shorts, hauts qui laissent apparaître les épaules ou le nombril, soutiens-gorge qui dépassent, absence de soutien-gorge… Même lorsque les températures sont très élevées, on demande à ces jeunes filles de mettre un gilet ou un pantalon. Les garçons subissent beaucoup moins d’injonctions quant à leur tenue et ne sont pas accusés d’y mettre une intention sexuelle.

L’argument principal qui justifie ces injonctions est malheureusement connu : ces tenues, dit-on, « exciteraient les garçons » et « les empêcheraient de se concentrer en classe » - sous-entendant que la « concentration » des garçons prime sur l’accès aux cours des filles. Illustration parfaite d’une culture du viol qui considère que ce sont aux femmes et aux jeunes filles de faire attention à leur manière de s’habiller, qui prétend que les garçons et les hommes ne seraient pas capables de se contenir à la vue d’une épaule, d’un sein, d’une cuisse. Faut-il le rappeler ? Une agression sexuelle ou un viol n’a qu’un seul responsable : l’agresseur.

D’autres diront qu’il s’agit simplement d’avoir une tenue « correcte », « normale » ou « républicaine » dans les mots de Blanquer. Mais en quoi une jupe courte ne serait ni « correcte », ni « normale » ou « républicaine » ? La notion de décence est le règne de la subjectivité et du moralisme.

Ne nous méprenons pas, quelle que soit l’argumentation proposée, l’enjeu est toujours le même : contrôler l’habillement des jeunes filles, considérer qu’il n’est pas acceptable que leur corps soit visible, alors même que ce sont elles qui le choisissent. Ces commentaires dévoilent, par ailleurs, le système de double contrainte auquel sont soumis les femmes et jeunes filles : trop court, c’est intolérable ; trop long, c’est intolérable aussi. En France, des policiers peuvent à la fois demander à une femme, seins nus sur la plage, de remettre son haut de maillot de bain et à une autre qui porte un voile sur la plage de l’enlever. Une femme doit montrer son corps, mais pas trop. Il n’y a aucune façon de gagner : être une jeune fille ou une femme, c’est se voir sans cesse scrutée, jugée, être sommée de trouver le juste milieu. Une société qui n’a de cesse de contrôler la manière dont s’habillent les femmes est une société profondément sexiste et patriarcale. Cette société discrimine particulièrement les jeunes femmes trans, mais aussi toute personne non-binaire, agenre ou ayant une expression de genre fluide.

En tant que personnels de l’éducation, notre rôle est de former la jeunesse pour l’avènement d’une société respectueuse des libertés de chacun·e. Ce sont les garçons qu’il faut éduquer, en leur disant qu’aucune tenue vestimentaire n’est jamais une invitation à quoi que ce soit, (ni à commenter, ni à toucher), et qu’il leur faudra bien apprendre à se concentrer en classe quelques soient les circonstances.

• Nous soutenons les jeunes collégien·ne·s et lycéen·ne·s dans leur combat pour le droit de s’habiller comme ils et elles l’entendent, et contre les remarques sexistes des adultes.
• Nous condamnons toutes les démarches qui visent à interdire l’accès à l’établissement scolaire à des élèves sous prétexte d’une tenue inadaptée.
• Nous condamnons les règlements intérieurs qui se transforment en police vestimentaire et restreignent de manière injustifiable la liberté des élèves et exigeons la réécriture de ces derniers.
• Nous revendiquons une réelle éducation pour tou·te·s les élèves sur les questions de sexisme, de genre et de consentement.
Grossophobie

En 2019, le terme grossophobie entre dans le dictionnaire : « attitude de stigmatisation, de discrimination envers les personnes obèses ou en surpoids ». Cette entrée est une première victoire symbolique pour les personnes et collectifs qui se mobilisent pour faire entendre la réalité des discriminations systémiques que subissent les personnes grosses ou perçues comme telles. La stigmatisation, les discriminations et le dénigrement que subissent ces personnes sont étroitement liées aux injonctions normatives sur les corps, qui pèsent avec d’autant plus de force sur les femmes. Aujourd’hui, dans les représentations (publicité, médias, films) et l’opinion commune, la minceur, voire la maigreur, est valorisée. Tout signe de surpoids fait l’objet d’une forte culpabilisation et s’accompagne de stéréotypes : paresse, manque de volonté, négligence, stigmate social.

Cette dynamique de culpabilisation est marquée par l’amalgame entre surpoids et obésité et par l’argument des enjeux de santé. Pour les associations concernées, il s’agit, d’une part, de « décorréler le surpoids de l’obésité » (compte-rendu des États généraux de la lutte contre la grossophobie, janvier 2017) ; et, d’autre part, dans les politiques de santé publique, de prendre en compte non seulement la santé physique, mais aussi psychique des personnes concernées.

La difficulté à assumer socialement un corps gros ou perçu comme tel se répercute dans de nombreux champs de la vie quotidienne :

➢ discrimination à l’emploi : une enquête menée par le Défenseur des Droits et l’Organisation Internationale du Travail en 2016 sur les discriminations à l’embauche liées au physique souligne « l’ampleur de la contrainte sociale qui pèse sur l’apparence des femmes est l’impact du surpoids dans les discriminations liées à l’apparence physique. En effet, le surpoids n’a pas d’effet spécifique chez les hommes, alors que les femmes en surpoids rapportent 4 fois plus souvent avoir été discriminées à cause de leur apparence que les femmes ayant un IMC normal »

➢ discriminations médicales :
personnels médicaux grossophobes, matériel inadapté (par exemple les tunnels de scanner ou IRM), pharmacologie également inadaptée (par exemple la pilule du lendemain impropre pour les plus de 80 kg)

➢ sociabilité : remarques d’inconnu·e·s, de collègues ou de parents d’élèves sur une prétendue grossesse dès lors qu’un ventre apparaît ; difficulté d’accès aux transports en commun, aux infrastructures accueillant du public, etc.

• Face à la grossophobie, ce sont toutes les représentations sur les normes de beauté et sur ce qui serait « acceptable » ou pas dans l’apparence physique qu’il faut déconstruire. Il est urgent que les autorités de santé publique prennent en compte, sans jugement, les variations morphologiques qui existent et qui sont le résultat bien plus de notre responsabilité collective (précarité) que de responsabilités individuelles.

Assignation de genre

Dès la naissance, les enfants sont assigné·e·s à un genre, féminin ou masculin, au regard des attributs de leur corps biologique. Les études de genre ont pourtant bien montré la nécessité de dissocier sexe d’une part, et genre d’autre part (c’est-à-dire la construction sociale des identités). De fait, la question des identités trans met en lumière les problèmes que pose l’assignation de genre. Les personnes trans sont obligé·e·s de se battre quotidiennement pour faire valoir leur identité face aux discriminations et violences transphobes systémiques.

Ils et elles subissent des injonctions contradictoires quant à leur apparence physique. L’injonction au « passing » (c’est-à-dire répondre aux normes de genre correspondant à son identité) s’abat de façon contradictoire sur les personnes trans : à la fois on les accuse d’être fausses si elles ne s’y conforment pas, et, dans le même temps, on les accuse de reproduire et de véhiculer des stéréotypes lorsqu’elles le font. Souvent, elles ont également à subir des questions intrusives sur leur corps (à savoir s’ils et elles sont opéré·e·s, s’ils et elles suivent un traitement hormonal) qui violent leur intimité.

• L’autodétermination, le respect des parcours de chacun·e et des prénoms et pronoms d’usage doivent s’imposer dans l’ensemble de la société à commencer par l’école (changements de prénom sur les listes d’appel, sur le carnet de correspondance, sur l’ENT, etc.)


Mutilation des enfants intersexes

Selon la définition de l’ONU, les personnes intersexes sont nées avec des caractères sexuels (génitaux, gonadiques ou chromosomiques) qui ne correspondent pas aux définitions binaires types des corps masculins ou féminins.

C’est d’abord avec l’accord des parents – parfois extorqué sous la pression par les médecins – parfois à leur demande, que les enfants et adolescent·e·s intersexes sont le plus souvent mutilé·e·s, opéré·e·s et soumis·e·s à des « traitements » hormonaux lourds. Les opérations et mutilations ne sont pas une intervention ponctuelle, à la naissance, comme on le croit souvent. Elles sont répétées, multipliées, durant toute l’enfance et l’adolescence – certains enfants sont opérés plusieurs dizaines de fois. Les opérations comme les traitements hormonaux peuvent également générer d’autres problèmes de santé. Outre ces mutilations, les personnes intersexes ont à subir stigmatisation et violences, en particulier à l’adolescence : les adolescent·e·s sont, en effet, obsédé·e·s – et socialement encouragé·e·s à l’être – par la transformation de leur corps et sa conformité aux normes de genre dominantes. Des personnes assignées filles qui n’ont pas de seins, pas leurs règles, une pilosité importante, ou des personnes assignées garçons qui ne développent pas de pilosité, dont le sexe ne correspond pas aux critères de masculinité… seront harcelées par les autres élèves, soucieux·ses de conformité aux normes de la féminité ou de la masculinité hégémoniques et voulant se démarquer de ces « déviant·e·s ».

• Les mutilations, stérilisations, traitements hormonaux non consentis sur des personnes intersexes, quel que soit leur âge, doivent cesser.
• Le droit à l’autodétermination des personnes intersexes doit être reconnu : respect du prénom et des pronoms d’usage des élèves dans l’Éducation nationale, possibilité de changement d’état civil libre et gratuit par simple déclaration devant un officier d’état civil en mairie, sans intervention des pouvoirs médicaux et judiciaires.
• La formation des personnels éducatifs sur les questions intersexes doit être effective.
• Une prise en compte, non pathologisante, des variations intersexes dans les supports pédagogiques doit prévaloir.

Droit à l’IVG

Partout dans le monde le droit à l’avortement est attaqué par le système patriarcal. Près d’une femme sur trois a recours à l’avortement au cours de sa vie. Chaque année, sur 1 000 jeunes de 12 à 14 ans enceintes, 770 ont recours à une IVG. Le droit à l’avortement est un droit légitime et nécessaire pour l’égalité des femmes et des hommes. Ce droit est remis en cause en France. Aujourd’hui, des femmes n’y ont plus accès, car les moyens alloués aux hôpitaux et centres IVG ne cessent de diminuer. En 2013, le Haut Conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes alertait sur la fermeture de 130 établissements spécialisés dans l’IVG en 10 ans. De plus, dans certains hôpitaux, de nombreux gynécologues invoquent la clause de conscience pour refuser de pratiquer cet acte.

Nous ne sommes plus en 1975, où il a fallu arracher le droit à l’avortement par une lutte acharnée. Il est donc largement temps de supprimer cette double clause de conscience caractéristique d’un autre âge, tout en maintenant l’obligation de communiquer le nom d’autres praticiens. La montée des extrêmes-droites remet également en cause ce droit fondamental pour les femmes de décider d’enfanter ou pas, quand et avec qui.

• L’accès à l’avortement est un droit
• La clause de conscience des professionnel·le·s de santé doit être supprimée de la loi ;
• Des moyens financiers doivent être donnés pour que les centres pratiquant l’avortement et les centres de planification soient accessibles sur tous les territoires ;
• Des campagnes d’information tous publics sont nécessaires pour pouvoir en parler librement sans tabou ni jugement ;
• L’éducation à la vie sexuelle doit être prodiguée à toutes et à tous pour qu’elles et ils puissent avoir des choix libres et éclairés.